par Maurice Tardieu

Pierre Bezot, talentueux généticien-sélectionneur, n’a jamais appartenu au Cirad, mais est un ancien du Tchad qui a failli rentrer à l’Irat (Francis Bour aurait bien voulu qu’il en soit ainsi).

Tardieu1951 MarseillePierre, né le 21 octobre 1928, était plus âgé que moi, de 40 jours ! Lui aussi était Marseillais et nous étions amis…

Nous avons fait quelques classes ensemble au lycée puis à la Faculté des Sciences. Nous avons tous deux hésité à nous engager lors d’une année entière : lui comme pion dans un lycée phocéen, moi comme prof d’histoire dans un collège technique (cela s’appelle l’utilisation des compétences) et accordéoniste le dimanche dans les dancings qui apparaissaient après la Libération.

Puis nous nous sommes engagés dans les services de l’Agriculture Outre-mer. Nous avons partagé la même chambre aux Provinces de France, de la cité universitaire, boulevard Jourdan à Paris. Nous avons suivi le même enseignement et avons aussi relu nos cours dans le métro qui nous amenait de la Porte d’Orléans à la Gare de l’Est, sur la route de Bondy…

Lui allait vendre le journal de gauche le dimanche, tandis que je restais à la cité. À l’époque Lyssenko et Mitchourine étaient ses références scientifiques.

Nous avons aussi pris le même bateau pour aller de Marseille à Abidjan pour faire notre 2e année d’Orsom (cela s’appelait ainsi à l’époque).

Puis la vie nous a séparés : j’ai été affecté au Sénégal, lui au Tchad où il a remplacé Marcel Niqueux au Bä Illi. Pendant plusieurs années il y a conduit d’importants travaux d’amélioration des mils pénicillaires, des sorghos hâtifs et tardifs (photopériodisme, vigueur hybride) et du riz (introductions systématiques et croisements).

J’ai été témoin de son mariage à Lasalle (dans le Gard) où il a rencontré sa future épouse,« une gentille personne » comme on dit à Marseille, née à Madagascar d’un père militaire. J’allais dans un temple protestant pour la première fois de ma vie.

Nous nous sommes retrouvés à Fort-Lamy, lorsque j’ai été affecté au Cameroun. Il a choisi Versailles et l’Inra, est devenu l’adjoint d’André Cauderon. A ce titre, il est allé en mission en Nouvelle-Zélande, où l’Inra tâchait de gagner du temps en faisant effectuer des contre-saisons dans l’hémisphère Sud. Il avait une superbe voiture avec un téléphone qui me semblait à l’époque être un objet merveilleux (j’ai changé d’avis depuis !).

Nous nous sommes revus à Paris, avec nos épouses. Nous venions Marie-Hélène et moi de Nogent, eux de Versailles.

Puis un grand silence et nous ne nous sommes pas vus, par ma faute, pendant une dizaine d’années, peut-être davantage. Par hasard, j’ai su que, à Montpellier, nous habitions à environ 500 mètres l’un de l’autre. Nous avons été heureux de nous retrouver, de reprendre le fil de nos histoires. Hélas, le temps nous était compté. Pierre n’a pu rencontrer René Tourte, Michel Jacquot, Jacques Chantereau et répondre aux nombreuses questions qu’ils avaient à lui poser. Il nous a quittés le 15 janvier 2021.

Adieu Pierre,

Il était un collègue, un copain, un ami, « un frère ». Nous nous connaissions depuis 1945.

Nous sommes de tout cœur avec Françoise, son épouse depuis 66 ans, et leurs deux enfants Danielle et Patrick.


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