Présentation d’ouvrage par Jean Pascal Pichot
Georges Monnet
Yves Launay
Vérone éditions
2022, 174 p.
Dans la mémoire de quelques anciens du Cirad, Georges Monnet n’est que le fondateur, fin décembre 1957, puis le premier président, de l’Institut français du café et du cacao, l’IFCC.
Sa biographie nous permet de découvrir les multiples facettes de la vie d’un homme qui n’a pas craint de s’engager au service des grandes causes qui ont marqué le vingtième siècle, mais dont nous n’avons pas toutes et tous gardé la mémoire. Sa lecture est une vraie révélation !
Au sortir de la Première Guerre mondiale, à laquelle il a participé à partir de 1917, Georges Monnet consacre ainsi plusieurs années à remettre en état un domaine agricole proche du Chemin des Dames dont les terres et le bâti avaient été ruinés par la guerre de tranchées. Ce faisant, il découvre les dures réalités du monde paysan français, gravement affecté par les pertes humaines, la concurrence des grandes exploitations motorisées nord-américaines et par la baisse des cours du blé.
Il s’engage en politique et participe aux débats sur le modèle d’exploitation agricole à privilégier : grandes exploitations motorisées intensives versus exploitations familiales de polyculture-élevage... et sur les moyens à mettre en œuvre pour sécuriser les revenus des agriculteurs... Comme de nos jours les partis de droite prônent le libéralisme et ceux de gauche la régulation !
Georges Monnet militera pour la création de l’Office national interprofessionnel du blé (Onib), qui deviendra l’Office national interprofessionnel des céréales (Onic en 1940). Toutefois, il lui faudra attendre 1936 pour y parvenir, quand il sera nommé ministre de l’Agriculture du Front populaire. Le chapitre qu’Yves Launay consacre à cette création de l’Onib est très instructif.
Cette période du Front populaire, puis celle qui précéda la Seconde Guerre mondiale, furent marquées par de multiples dissensions entre et au sein des partis politiques. Elles éloigneront Georges Monnet de ses amis politiques et en particulier de Léon Blum.
Les divergences entre députés et sénateurs étaient déjà à cette époque source d’impuissance de la démocratie… Voir à ce sujet les débats sur le statut du fermage et l’extension au secteur agricole des avancées sociales en faveur du monde ouvrier.
La guerre, puis les pleins pouvoirs accordés par le congrès à Philippe Pétain éloigneront Georges Monnet des vicissitudes de la vie politique, mais il assurera de 1940 à 1944 le secrétariat du comité d’organisation de l’industrie des jus de fruits, industrie dont il avait pressenti le développement. L’accent mis par Yves Launay sur les relations entre Léon Blum et la famille Monnet pendant cette période turbulente semble un peu surdimensionné, voire anecdotique…
Mais dans la foulée, si on peut dire, Yves Launay nous apprend l’existence au sein de la IVe République d’une troisième chambre : l’Assemblée de l’Union française dont les membres étaient pour une part déléguée par les territoires d’outre-mer et une autre part désignés par le parlement français.
Georges Monnet y siégera pendant 12 ans au titre de l’assemblée territoriale de Côte d’Ivoire et en présidera la commission de l’agriculture, ce qui l’amènera à faire des missions de terrain et à œuvrer avec des hommes politiques africains. Malheureusement, cette troisième chambre n’avait que la possibilité de faire des propositions pour sortir les agriculteurs africains de la misère... auxquelles les deux autres chambres ne furent pas sensibles.
Néanmoins, Georges Monnet avait pris conscience des difficultés des petits planteurs de caféiers et de cacaoyers et de l’absence de recherche agricole sur ces productions. Il a donc créé, à l’image de l’Ifac dont il était administrateur, un institut de recherche dédié à ces cultures : ce sera l’IFCC.
Simultanément, Georges Monnet accepte la proposition du président Houphouët-Boigny de devenir le premier ministre de l’Agriculture de la jeune République de Côte d’Ivoire, de réorganiser les services existants et de créer les outils indispensables au développement de la production agricole (crédit, recherche, encadrement, caisse de stabilisation, etc.). Il exercera cette fonction jusqu’en 1961 et restera conseiller personnel du président quelques années.
Rentré en France, Georges Monnet se voit confier, à 63 ans, par le ministre Edgard Pisani le soin de dynamiser le Centre national d’expositions et concours agricoles (Ceneca) et de créer un salon international de l’agriculture dont la réputation et la fréquentation n’ont fait que croître.
J’espère que ces quelques flashs vous donneront envie d’en savoir plus sur ce grand serviteur de l’État.
Enfin, notons que Georges Monnet est le père de Jean-Claude Monnet récemment décédé.
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