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C’est avec une profonde tristesse que nous vous informons du décès de Jean-François Duranton, survenu le 20 juin 2024, à l’âge de 78 ans. Jean-François avait pris sa retraite en décembre 2010.

Jean-François Duranton, né le 14 septembre 1945 à Beaulieu-les-Fontaines (Oise), était un chercheur éminent du Cirad, y ayant effectué la presque totalité de sa carrière, dans le cadre du Prifas de 1975 à 1997, puis au sein de l’unité Ecologie et maîtrise des populations d’acridiens de 1998 à 2010.

Elève de Marcel Guinochet, professeur de botanique et phytosociologie à l’université de Paris-Saclay (Paris XI Orsay à l’époque), il commence ses activités dans le domaine des criquets ravageurs à Madagascar, où il fit un premier séjour en 1969-1970 qui lui permit de soutenir une thèse de 3e cycle. De 1971 à 1973, il travailla de nouveau dans la Grande Ile dans le cadre d’un projet FAO de recherche sur le criquet migrateur malgache. Les travaux alors réalisés lui permirent de soutenir une thèse de doctorat d’Etat, en 1975, à l’université de Paris-Saclay. La même année, avec Michel Launois, My-Hanh Luong et Michel Lecoq, il crée le « Programme de recherche interdisciplinaire français sur les Acridiens du Sahel », resté plus connu sous son acronyme Prifas. L’ensemble de ces quatre chercheurs est alors recruté par le Gerdat. La première affectation de Jean-François est au Burkina Faso, à la station agronomique de Saria en compagnie de Michel Lecoq, dans le cadre d’un projet de recherche sur les sauteriaux du Sahel Ouest africain avec une attention particulière pour le criquet sénégalais Oedaleus senegalensis qui s’était multiplié en abondance dans tout le Sahel à la suite de la grande sécheresse de 1973. De retour en France, en 1977, ses compétences de botaniste, d’écologiste et d’acridologue (spécialiste des criquets ravageurs) l’ont ensuite amené à voyager sur tous les continents. Il a, en particulier, effectué de très nombreuses missions en Afrique, dans les habitats désertiques du criquet pèlerin. Il est intervenu à de multiples reprises à Madagascar, tant pour des opérations de recherche que de développement en appui au centre national antiacridien, que pour des missions d’appui à la coordination d’opérations de lutte contre une invasion de criquet migrateur en 1997-1999 et, dans les années suivantes, pour contribuer au développement d’outils de surveillance et de prévention des invasions. Mais ses travaux l’ont également mené dans bien d’autres endroits, au Brésil, au Pérou, aux îles du Cap Vert, en Sibérie… et ailleurs, sur tous les continents. Dans les années 90, il participa à de nombreux essais en lutte antiacridienne à une époque où il convenait de trouver des remplaçants aux insecticides organochlorés désormais interdits. A cette occasion, une mission en Erythrée se termina par une évacuation sanitaire dont il se remit difficilement. A la même époque, à Montpellier, il fut un acteur important du projet de modélisation du criquet pèlerin visant à améliorer la surveillance de ce ravageur majeur. Mais c’était avant tout un homme de terrain. Grand connaisseur des milieux sahariens, il fit plusieurs fois la traversée du Sahara et rien ne lui plaisait tant qu’un bivouac avec son équipe, au milieu de nulle part, au pied d’une dune dans l’Adrar mauritanien, ou au bord d’un oued asséché dans le Tamesna nigérien. Ses déplacements à travers le monde l’ont bien sûr amené à rédiger une multitude de rapports de mission et d’expertise. Il est aussi l’auteur ou le co-auteur de diverses publications scientifiques, de communications dans des congrès internationaux, ainsi que d’ouvrages parmi lesquels on peut citer, entre autres, le Manuel de prospection acridienne en zone tropicale sèche écrit au fil de plusieurs années en collaboration avec Michel Launois, My-Hanh Launois-Luong et Michel Lecoq, et publié en 1982 par le ministère des Relations extérieures à Paris (2 vol., 1506 p.) ; mais aussi l’Etude écologique des biotopes du criquet pèlerin en Afrique Nord-Occidentale en collaboration avec Georges Basil Popov et Jérôme Gigault, publié en 1991 par le Cirad (743 p.) ; ou encore la Florule des biotopes du criquet pèlerin en Afrique de l'Ouest et du Nord-Ouest  écrit avec Antoine Foucart et Pierre-Emmanuel Gay et publié en 2012 à Rome par la FAO (487 p.). Jean-François Duranton a encadré tout au long de sa carrière les travaux de multiples étudiants, français ou étrangers, en master ou en thèse dont, pour n’en citer qu’une, celle de Mohamed Abdallahi Ould Babah Ebbe, directeur pendant très longtemps du centre de lutte antiacridienne de Mauritanie et jusqu’à une date récente directeur de l’Institut du Sahel à Bamako. Jean-François a également contribué à former de très nombreux prospecteurs et techniciens des services antiacridiens en Afrique comme à Madagascar. Scientifique cultivé et engagé, connu pour ses qualités humaines, dévoué à la recherche antiacridienne au bénéfice, essentiellement, des populations rurales des pays en développement, il restera une figure marquante de la recherche de terrain sur l’écologie des acridiens ravageurs à la jonction du 20e et du 21e siècle.

Hommage rédigé à la demande de l'Adac par Michel Lecoq et Antoine Foucart

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